Une nouvelle petite histoire de couleur. Il n’est plus question de rouge (Voici bien de quoi rougir) ou de bleu (La vie est bleue, comme… ou La robe bleue), mais de noir cette fois. Et comme chez l’artiste à qui j’ai emprunté le titre de ce billet, le noir cache dans la nature des profondeurs et des jeux de lumière insoupçonnés.
Le plumage de certains oiseaux de paradis possède des nuances de noir intenses, beaucoup plus sombres que celles des corbeaux ou des corneilles. Des chercheurs de l’université de Harvard ont récemment démontré que la présence de microscopiques structures tordues en était responsable (publication de Nature Communications du 9 janvier 2018) .
Ils ont mesuré la quantité de lumière absorbée par différentes plumes noires et constaté que les plumes « extra-noires » absorbent jusqu’à 99,95 % (c, d, e, f et g sur l’image ci-dessous) de la lumière qu’elles reçoivent. Les plumes noires communes en absorbent seulement 96,8 % (a, b). La mesure confirme donc ce que nous percevons visuellement…
Pour en comprendre les mécanismes, les scientifiques ont observé les plumes en microscopie électronique (à balayage, qui permet de voir les volumes) et par tomodensitométrie (CT-scan). Ils ont ainsi mis en évidence des structures visibles uniquement chez les plumes extra-noires (b) : des barbules effilochées, couvertes de pointes qui créent une série de profondes cavités courbées. Ces structures sont absentes des plumes classiques, plus lisses (a).
Ils pensent que ces pointes et ces creux dispersent les rayons lumineux à de multiples reprises, permettant ainsi une absorption plus importante de la lumière et un plumage plus sombre.
Quel avantage sélectif ces structures absorbantes apportent-elles ? Il est probable qu’un plumage extra-noir permette de mettre en valeur la brillance des plumes colorées voisines, et de remporter la partie (et le parti) lors des parades nuptiales.
Pierre Soulages. Peintures.
Références
L’article en question
Structural absorption by barbule microstructures of super black bird of paradise feathers, Dakota E. McCoy et al., Nature Communications, janvier 2018.
https://www.nature.com/articles/s41467-017-02088-w
Les outrenoirs de Pierre Soulages
http://www.pierre-soulages.com/